Quand l'encre tout juste sèche sur la page, En mon livre posthume tout fermé, tout sage, Un cercueil de poussière habillera ce linceul, Dont personne ne portera jamais le deuil.
Catafalque de papier, maelström d'idées Parsemé de fleurs et de douce rosée, De tendres visages et de sanglots enfouis, Que des mots étoilés ont extirpés de la nuit.
Au gré du vent qui tourbillonne et des marées, Se couchent des lettres vouées à la postérité ; Le culte du souvenir, un déni de mourir, Habitent ceux que la terre va recouvrir.
Désillusion ultime, seulement quelques lignes, Résument condensée une vie qui trépigne. Les rayons de soleil, les pluies, les écueils, Peignent en noir et blanc les extraits du recueil.
Qui se souciera d'en creuser le contenu ? Qui osera peler et mettre ses vers à nu ? Ce creuset où voguent et où s'emmêlent, Des états d'âme, des états d'cœur, pêle-mêle.
Secret inavoué de l'auteur, espoir récurrent, Qu'un visage ami, un de ses enfants, Sur des pages saupoudrées de pensées latentes, Pose ses yeux embués de larmes compatissantes.
