Le Miroir
Est-ce vous, aperçu aux éclats de la glace,
Vous qui moqueur faisiez de si viles grimaces,
à ce frêle inconnu qu'une calvitie domine,
Au visage ravagé par les rides et les mines.
Chacun de ces plis, augure d'une souffrance,
D'un appel au secours dans ses moments d'errance,
Une gifle de la vie qu'une main gantée d'épines,
A apposée sur cette face, une teinte opaline.
Son doux regard, qui d'airain se pailleta,
Où le dernier feu, perdu dans un souffle haleta,
Témoin du déclin des humains et des âmes,
Noyé de désespoirs et par autant de larmes.
Sur son vaste front ravagé de précipices,
Des rivières de sueur ont creusées des abysses,
Les chagrins, les soucis ont dessinés des fossés,
Où se sont fourvoyés, noyés, ses espoirs délaissés.
Une palmeraie s'étend aux confins de ses yeux,
Où s'entassent accroupis ses amours malheureux,
à trop scruté les déserts espérant l'oasis,
S'est altéré sa vue et flétri ses iris.
Ses joues se sont creusé d'une insolente pâleur.
Sa bouche a perdu le sourire enchanteur,
De ses années bonheur épanouies de jeunesse,
Avant les trahisons, les complots, les faiblesses.
Pourquoi tant de dégâts, pourquoi tous ces bandages,
A-t-il fait des abus qui déjà le ravagent,
Le destin seul, enrobé de ses aléas, ravi,
Le vent frais d'automne qui souffle sur sa vie.
Mais ce frêle inconnu, je crois le reconnaître,
Ses traits me rappellent ceux d'un pauvre être,
Dont la folle destinée fut toujours en émoi,
certes me ressemble, mais ce n'est pas moi.