Entends-tu le cri de la rose coupée ?
Un jeune homme en son jardin vit de belles roses,
Qu’il voulait cueillir pour faire un bouquet grandiose.
Alors qu’il s’approchait de la première rose,
Celle-ci lui dit alors avec un air morose :
Pourquoi nous faire souffrir en nous coupant ainsi,
Et ne pas nous laisser être les tifosis
De ce beau jardin floral vraiment réussi ?
Je veux que vous soyez Chloris dans mon salon
Et que vous soyez sujettes à l’admiration
De toutes les personnes qui passent devant vous.
Je peux autant être admirée dans ton jardin,
Sans que bonnement tu deviennes un assassin!
Allez, laisses nous en ce lieu et je t’absous!
Nenni! Votre destin est de fleurir nos tables
Et de nous offrir votre beauté admirable.
Ainsi, tu nous fais mourir prématurément,
Dit la rose, sans aucun accommodement.
A tant faire que de mourir, dit le jeune homme,
Autant le faire dans la beauté, en gente dame!
Et toi, que dirais-tu si tu mourrais ainsi?
Je t’en prie. Ne fais pas de nous des êtres occis!
Tu nous condamnes en nous livrant à ton caprice,
Vois plutôt la beauté avant de faire justice.
N’est-ce pas plutôt ton plaisir qui compte pour toi,
Les compliments, et non pas la beauté en soi.
Songe-y, dans un bouquet je vous fais si belles,
Que votre teint frais de rose se renouvelle.
Vous y gagnez toute la splendeur à nos yeux,
Et gagner auprès de nous la faveur des dieux.
Ta raison est folle; Ce ne sont que paroles
Au goût amer, et qui ne sont que fariboles,
Lui répondit la rose, embuée de tristesse.
Comment, dans ton salon, peux-tu, avec adresse,
Nous rendre au soleil l’éclat de notre beauté,
Que par ton acte tueur tu as emprunté.
Notre luminosité éclaire la nature
Et entraîne nos louangeurs dans l’aventure,
De voyages intérieurs où la beauté poindra
A l’horizon du bel espoir qui conviendra.
Notre symbole, aucun homme, ne laissera,
Dans la nature, de sa force, il héritera.
Comment peux-tu donc nous sortir de la nature?
Je le fais donc pour que vous ayez fière allure
Que vous naissiez dans une nouvelle parure,
Au milieu d’autres fleurs, lui lâcha le jeune homme,
Et que peut-il y avoir de plus beau, en somme!
Donc, à tes yeux, c’est la beauté qui doit primer,
Lui dit la rose, sans vouloir le réprimer.
Alors, en âme et conscience je te propose
Cet accord que, devant la beauté, je dépose.
Quand la beauté réelle, auprès de toi, s’impose,
Chasse la beauté fictive qui en toi se dépose.
Préfère un jardin élégant et harmonieux,
A quelques très beaux bouquets de fleurs dispendieux.
Je comprends ce que tu veux lui dit le jeune homme.
A raison, il ne faut pas tromper la beauté,
Elle peut laisser supposer sa présence, en somme,
Mais sa réalité peut être, en vous, abrité.
Il importe vraiment d’y aller la chercher,
Après l’avoir intensivement désiré.
Ce jour-là, les roses ne furent pas coupées.