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Jean CAELEN

De terre et de bois

De terre et de bois, algues entortillées, pampres et réséda
Au rire de la lune l’écho de la carapace d’ambre
Ecoutille amarrée à l’aigue-marine
Lamparo flottant sur la mer, écorchure brune.
Quand vient ta présence à l’angle du canevas
Je me tisse comme l’érable noueux
De ce tapis de haute laine dans l’atelier sombre
Tout me lie à toi, la dentelle du jour,
le fil de trame de l'heure
Les pampres aromatiques à la morsure du froid.
Sous la tonnelle de fleurs acides
Ta main me retient, m’immobilise, m’initie à moi-même
Ta main qui me forge, fil de hampe tendu
Dans le soir qui jamais ne se dévêt.
Je m’agrippe à toi comme une haie vive
Je reste accroché comme l’oiseau au fil nu
Dans le canevas de tes jambes qui s’étirent sur le tapis de
haute laine
Velours de ta peau, dentelle de tes caresses à jamais
renouvelées
Le réséda monte de ta gorge, il démâte et se dénoue
Il suit l’axe ascendant pour s’épanouir en couronne
A la lisière de ton regard abandonné.
L’accord de toutes les cordes de la harpe à la fois
De mille gestes ensemble qui effleurent ton corps
J’en écoute les ressacs sur le pas de la porte
Où le réséda s’écoule en grappes lourdes et sensuelles.
Tout de senteur, tout de sève, la maison s’ouvre
Dans ce voyage aux mille irisations
Qui me prolonge en toi, corbeille offerte de senteurs
Dans cet espace de regards enrubannés, gorges embaumées
Où le dahlia et l’ancolie butinent sur tes lèvres.
Tu es de jade transparente, pierre blessée, écorchée
Tu es de sable et d’eau, tu coules dans ma main
Mon corps te capte, torrent de feu, volcan qui tressaille
Et collines ondulantes au fond de la vallée.
J’aime tes soupirs tendus de mains qui tricotent la laine
soyeuse
Traces de baisers sur ma bouche comme des fleurs ennoblies
Visage emmuré d’extase au cadran solaire
De l’abeille qui danse sur la ruche qui déborde de miel.
Tu es le spasme de la vague mourante, étale
Qui irrigue la plage luisante, étendue et lasse
Où le vent n’est pas plus qu’un souffle qui me porte
vers ton être
Mains qui me retiennent et m’attachent au bastingage.
Je suis de toi, je suis de tes mains qui me pétrissent
De tes lèvres qui me disent
De tes seins qui me nourrissent
De tes envies qui nous unissent.