Mon pays est une jeune fille au coeur lourd Que le massif crayeux des Corbières protège Des assauts d'un vent fou dont le rire rend sourd, Démon né de quelque terrible sortilège.
Mon pays est une jeune fille aux yeux doux Dans lesquels le sculpteur, le peintre ou le poète Voient la source couler au pied du Canigou Et Collioure aux quartiers éclairés par la fête.
Mon pays est une jeune fille aux pieds nus Qui marche dans les champs en dépit des blessures Que l'existence inflige à ses membres menus, Si pauvre qu'elle ne peut porter de chaussures.
Mon pays est une jeune fille aux cheveux Que la marinade amoureusement caresse Et que le vent d'Espagne au long souffle nerveux Fait frémir sous d'étranges bouffées de tendresse.
Mon pays est une jeune fille aux chansons Qui viennent apporter à l'oreille autochtone Ces cris d'espoir, montant de tous les horizons, Qui naissent au printemps et meurent en automne.
Mon pays est une jeune fille qui dort ; La nature, en avril, lui fait une litière De mimosas, de genêts et de boutons d'or Et pose un long baiser sur tout son corps de pierre.