Pol aborda prés de la roselière. La vague se cabra, jaillit. L’ermite dit sa première prière. Le vent hurlait. Son cœur faillit.
Ses songes le poussèrent vers la plage du Stiff. Autour l’île vide, sans âme. Ses douze compagnons fuyèrent l’esquif Qui se brisa sous la lame.
C’est Lampaul. Carillon, plomb fondu du canon. Croix, pierres des disparus, Dont la pluie lave jusqu’à l’ombre du nom, Feux du phare, chasseurs d’intrus.
Aux côtes escarpées de l’extrême Ouessant, Ma plate île d’épouvante, Sont nés les marins de l’Aigle, du Conquérant, Eux, la sirène les chante.
Sur La Malicieuse, vaisseau de guerre, Se noyèrent les soutiers. Sur La Renommée, toute voilée de verre, Ont disparu les gabiers.
A l’aube froide, basse et couverte d’embruns, La nuit cesse de rugir. On entend en vaine pâture de foins bruns Tous ces moutons noirs gémir.
Dans la coque de la maison verte et blanche, Grand’ ouverte au Sud, au Nord, Tu chauffais ton cœur contre mon cœur étanche Pour chercher refuge à son bord.
Tu lisais Kellermann et tout haut tu rêvais. L’ouragan craquait au moulin. D’un rire clair tu chassais tous les vents mauvais. L’écume refaisait son plein.
Aux croix de Lampaul, j’ai du graver le seul nom Et ma peine entière, Ta vie de laine que jamais ne fileront Les vieilles filandières.
Sur la côte, prés de la roselière. La vague se cabre et jaillit. Je dis pour toi ma dernière prière. Le vent hurle. Mon cœur faiblit.