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Jean L INFONTE

Rick's Café Ragtime

Sables engloutis, je lève les bras,
J’offre quatre fois, points cardinaux,
Ma poitrine nue. Le vent coule ras.
La dune frise aux plis virginaux.
L’or du royaume, cieux verticaux,
Dans tes mains sombres n’est que corolle.
J’accuse l’astre qui te rend folle.
J’abdique ma foi, je porte ma croix
Aux confins où l’horizon décolle.
Bleue Antinéa, reine sans ton roi.
Terre d’éboulis, tendue sous le drap
Du linceul brûlant du ciel fourneau
Où mon coeur à nu, vaisseaux, coulera.
La dune plisse, creux inguinaux,
Où l’or atome, libres radicaux,
Dans tes mains sombres n’est que l’obole.
J’enflamme l’astre des limbes molles.
Je clame ma foi, je plante la croix
Et la couvre de soie de l’étole.
Bleue Antinéa, reine sans ton roi.
Aux ergs en roulis qu’un Dieu ancra
Sans nul Océan, aux fonds infernaux
Où Hadès vaincu, sur le cou les rats
Hors des égouts secs, pauvres animaux,
Brûle l’or – argent, brillants asticots
Des momies sèches. La langue colle
Au chaud natron. L’astre s’étiole.
Je plie sous sa loi, je rends l’ankh en croix,
Ô Akhenaton, pauvres idoles.
Bleue Antinéa, reine sans ton roi.
A mon cou sans vie, la farandole
De tes doigts d’ambre resserre le col
D’un carcan de feu. Sur le marbre froid
Un baiser de feu, fondante tôle.
Bleue Antinéa, reine sans ton roi.
J’enfouis mes deux mains où ma vie s’éteindra.
Mon âme s’abolit entre quatre panneaux
De cèdre odorant qu’un seul clou fermera.
Mon esprit s’élève, s’envole l’étourneau
De mon souffle chauffé, seule parabole
Légère de fumée, dans le rond d’un anneau.
Tu cherches, fébrile, aux creux des fioles,
Le secret de ma vie, fil de sable étroit
Qui coule, sablier que rien n’affole.
Bleue Antinéa, reine sans ton roi.
Et puis la reine, si pâle, lèvera
Aux plages stériles, dans tous ses arsenaux,
Des orchestres royaux. Elle étendra les bras
En rythme, Hosannah. Du blues dans mes canaux.
Oh, Louis, trompette, Duke en prime rang,
Blanton contrebasse, deux noires la blanche,
Big band, swing des sables, Mingus en fou errant,
Antinea, be bop, met ses mains aux hanches.
Mhwop, ma reine blanche que l’échec désole
Supplie Yemanja, tablature en sol.
A one, two, one, two, three. Et un, deux, un, deux, trois.
Solo sous la lune, rag des caravanes,
Le quartet transpire, pithécanthrope droit.
Je swingue dans ma mort. Feu sur la savane.
Bleue Antinéa, reine du blues roi.