Suave abdication
Tu es mon Orient, le début de mon jour,
La goutte de café qui perle ta lèvre,
Le souffle d’un bonjour, mon baroque séjour,
L’escarboucle verte qu’incise l’orfèvre
Pour sertir en bijou l’amande de ton œil.
La perle de café coule sa fièvre,
Hésite un instant pour mourir au cercueil
D’un baiser de parfum, léger, aérien,
Où volent les notes de ton âme, au seuil.
Toi, la rédemption, de moi, galérien,
De mes noirs dossiers, de ma vie rapace
De seigneur boutiquier, de roi vaurien.
Voilà que tu parais. En ce point, l’espace
N’est plus temps. Le monde se courbe et suspend
L’envol des secondes. Voilà que tu passes,
Et Atlas te salue. Et même le serpent
En oublie son serment. Le soleil dans la rue,
Le rire d’un enfant, les terrils, les arpents,
Les astres, l’univers, la course où se rue
L’humanité courbée, cela t’est cortège,
Maîtresse sans souci. Car ma reine est nue.
Tu es le la majeur de toute l’arpège.
Les portées mineures, les pensées sans valeur
Qui peuplent le galop de mes tristes manèges,
Sont sourdes symphonies, petits sons sans ampleur
Quand ta voix me murmure. Comment ai-je vécu
Sans ton goût, ta saveur, sur ma peau ta chaleur ?
Tu es mon Occident. T’aimer … Tu m’as vaincu.