J’ai ce soir mille envies d’écouler ma mémoire En tournant lentement les pages d’un grimoire Où Paname exposa aux frimas de Nivôse Le départ hasardé de mon compte à rebours
De l’adret du massif au méandre du gave S’ouvre le val d’Ossau tel une mi enclave Où de cime en versant, de torrent en dérive S’étale Adour, Béarn, aux berges de la Nive.
Au pied de la paroi de mes fêtes foraines Se fortifia mon pas galoché d’Hasparren Cliquetant au préau du petit séminaire Le tempo martelé d'un demi-pensionnaire
Avant de s’arrimer aux rives de Garonne A l’aube des années que le plaisir claironne L’arrière goût du sang ou celui du cyanure Que le temps assassin vous injecte en piqûre
Au soleil rayonnant c’est toujours le printemps Dans le miroir troublant des visages d’antan Et le moment diffus criblant de son impact L’écran du souvenir, redoutable flash-back.
Aux pages d’amitié j’ai vécu à outrance Jacques soit-il loué en offrant la présence D'un témoin souverain des années d’insouciance Décrocha le filin de nos rives d’enfance.
Les demains ont pourtant lézardé le destin Comme une opacité à ce miroir sans tain Quand l’absence immisça la cruelle présence Des jours cadenassés aux barreaux du silence.
Sur le quai déserté d’amitiés en souffrance Survint le temps crétin d’aller servir la France, Aux casernes grisées étouffant nos vingt ans Où l’écho militaire déverse un flot jusant.
En ces jours étalant le reflux du pourquoi Cupidon remisa tant de flèches au carquois Jusqu’au jour où monta la fragile promesse De ton amour païen servant nos fausses messes
Quand frôlant le velours de ta lèvre incarnat Sans la règle d’un jeu dépourvu d’hosanna Le désir capiteux d’un rose à fleur de peau Est venu consumer un agent des impôts.
Un souffle printanier ouvrait de prime-saut La rue redescendue au bras de mes cerceaux De l’Olympia à Bobino les consœurs capitales Montaient en crescendo nos fièvres musicales.
Un prime fruit d’amour vint gonfler ta chemise Et les larmes salées des canaux de Venise Quand la vie se dévide en ces insurrections Où le cœur à genoux nie la génuflexion