Où est cette école à effacer les accents Où l'on apprend à bien parler entre les dents Sans couleurs sans parfums sans l'histoire des gens Dans la même intonation uniformément
Il suffit de marcher au pas de son cheval De pédaler lentement le long d'un canal De transpirer un peu en franchissant un col De s'arrêter voir un grand aigle dans son vol
Pour entendre un souffle un chant et des accents Pour comprendre que là les mots sont différents D'ailleurs là-bas où ils se parlent autrement Identiques et peints d'un autre sentiment
Les hommes et leurs mots ont leur propre histoire Les uns sans les autres c'est rédhibitoire Il faut avoir renier ses origines Pour parler sans accent où l'on se devine
A parler les lèvres prisonnières du temps Sans la couleur le goût du vent et des printemps Les mots s'affadissent ne disant qu'un seul ton Des idées de lieux communs un verbe unisson
A ne plus entendre les mots différences Le Danube a la couleur de la Durance Sur un fond grisâtre de langue consensus Le même goût les mêmes mots loin de nos us
Comment se reconnaître à n'ouïr qu'une voix Pourquoi vouloir comprendre le même que soi L'amour la haine et la paix ont besoin de tons Aux couleurs des racines de nos discussions
Bientôt partout la même langue muette A dire des banalités et des sornettes Construite pour faciliter les échanges Et cacher les différences qui dérangent
Où est cette école à effacer les accents Où l'on apprend à bien parler entre les dents Sans couleurs sans parfums sans l'histoire des gens Dans la même intonation uniformément?
