Un poulet s'exhibe nu sur une broche Ayant déposé au vestiaires ses plumes Il suinte la graisse et pisse un jus moche Je crains fort que par ce froid il ne s'enrhume
Cocorico en lettres rouges sur le front C'est l'enseigne feu de cette rôtisserie Sous le calot blanc immaculé d'un mitron Les gouttes de sueur perlent d'un front bien rougi
La volaille n'a décidément pas d'honneur A exposer ainsi sa chair aux appétits Des passants jetant sur elle des yeux d'horreur Devant tant de jus coulant d'un corps si petit
Le patron des lieux aiguise un très long couteau Pour mieux couper le cou des poulets à cuire Il jette son oeil bleu goguenard aux badauds Lançant des appels aux belles qui l'inspirent
"Pour une aile la cuisse d'un cocorico Pour le blanc les sot-l'y-laisse et les deux pilons Y'a rien de meilleur et surtout rien de plus beau Qu'un poulet cocorico cuit sur mes tisons"
Les gens se bousculent à l'appel de son cri Etonnés d'une si parfaite imitation Du cri du coq à l'aurore poussé par ici Il crie plus fort "ça c'est pas le son du chapon"
Chacun sourit en lui donnant sa commande Et prend ses mercis scandés de cocorico Seule la volaille que chacun quémande Reste de marbre roussit et sue sans un mot !