Je lui avais promis, dans l’un de nos secrets, D’écrire un roman, qui lui serait destiné. J’ai cherché, jusqu’au tortueuses profondeurs De l’inspiration, quel pourrait être l’objet D’une intrigue romanesque à bien ordonner, Pour qu’à la lecture elle trouve son bonheur.
Rien n’est jamais venu couler sous ma plume Ni sous les touches du clavier d’ordinateur. Des phrases sont nées, fades, sans orientation. J’ai couché sur le papier des mots qui fument Une mauvaise ivresse de pâle conteur, Brouillard épais de mauvaise combinaison.
Je crois qu’elle a cru à cette vieille farce, Qu’elle attend toujours, trente ans après, les pages D’un texte dédicacé construit pour elle. Je me suis décidé à jeter, éparses, Les feuilles que j’avais pu noircir, trop sages, Pour faire un texte qui s’envole vers elle.
Elle ne reçoit qu’une très longue pesanteur De mots torturés, coloriés ou transformés, De poèmes qui chantent ou bien qui pleurent. Je ne suis pas romancier, je suis rimailleur. Je coupe, hache, scande, des mots atrophiés, Parfois les fais chanter pour mon plus grand bonheur.
Mais j’ignore à jamais tout de la construction D’un texte portant la vie de personnages. La méthode se refuse à mon intuition. Elle attend, dans ce vieux secret, cette fiction. Notre relation, comme un parfait mirage, Surnage au large de mes versifications.