Année, toi qui frappe aux portes du trépas, Dans la pauvre lueur d’un jour gris silencieux, Trop semblable à la nuit, tu t’enfuis par le chas Du temps qui te dévore sous les larmes des cieux.
Ton soleil épuisé croise une lune rousse. L’hiver colle à mon cœur comme à l’arbre la mousse. La nature figée reconnaît cet enfant : Un enfant de décembre orphelin du printemps.
Va, enfant de décembre aux pas ensevelis Retrouver tes pareils, sagittaires glacés, Dont la lyre s’accorde aux cris des cœurs blessés ! Savoure l’instant triste et sa mélancolie.
Il neige, et ce silence qui tombe de si haut Me rappelle tes lèvres qui n’osaient pas les mots ; Les flocons se donnent à mourir au chemin : Le parcours de tes doigts au détour de ma main !
Et les chants se sont tus ; et le vol suspendu Des ruisseaux dans les prés semble l’eau de tes yeux, Qui ne coulera plus. Nos serments précieux Sont entrés dans l’hiver où l’amour s’est perdu.
Ô enfants de décembre dont les ombres s’allongent Au soleil languissant, arbres noirs et sans feuilles … Vous rêvez le printemps dont vous portez le deuil ; La sève se replie et le regret vous ronge.
Ah, les journées de mars aux couleurs fugitives, Qui habillaient nos sens d’amoureuses dérives ! Que nous en reste-t-il, sur la rive des heures ? La cendre des regards et l’écume des cœurs !
Ainsi décembre vient et je suis son enfant, Dont la mère met bas dans la neige et le vent. L’eau de l’œil qui se fige gèle un souvenir, Emprisonne de glace d’ineffables soupirs .
La débâcle viendra, la vie en sortira, L’écureuil reniera son hivernal butin, Un oiseau chantera, un oiseau, un matin, La neige aura fondu … et tu me souriras.