Ô ma douceur et ma douleur, Ö mon bonheur et mon malheur, Mon eau-de-feu, mon brûle-cœur, Voici venir l’heure des heures …
Quand le ciel appuyé sur les bras des grands arbres Offrira sa voussure aux baisers de la nuit, Sous le chant de la nuit, ultime candélabre, J’irai, je partirai, oiseau tombé du nid.
J’irai, multiple et seul, agonisant de toi, Escorté d’une foule impalpable de rêves, Titubant sous ton poids, dans la lumière brève ; Mes souvenirs en meute me chasseront vers toi.
Ô ma douleur de vivre et ma douceur d’aimer, Tu cherches un bateau ivre qui est resté à quai ; L’eau de tes yeux m’enivre mais tes yeux sont fermés. Que la douleur est vive, passée l’heure d’aimer !
Un écureuil curieux, une biche timide, Pourront croiser mes pas dans le lit de l’automne ; Je continuerai ma route monotone, Orphelin de l’amour, cristal parmi le vide.
Il est des orphelins dont la mère est vivante Et vient le soir tombé caresser leurs cheveux. Essuie ce front mouillé des rêves qui le hantent, De ton aile clémente, ô mon Oiseau de Feu !
La torpeur de la nuit couvrira d’un manteau Et les sons et les bruits, les échos du piano Qui joue cette leçon qu’un jour tu m’as donnée … Cette nuit je mourrai ; et ce jour je suis né.