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Jean-Michel BOLLET
Allez vers le feu
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Jean-Michel BOLLET
Allez vers le feu
Ô vous les désarmés au cœur nu solitaire
Vous qui savez le poids de l’eau et de la terre
Révoltés dont le front saigne en heurtant les murs
Lutteurs toujours blessés dans des combats obscurs
Vous qui mettez le ciel en courbes et en lignes
Chercheurs penchés sur les figures et les signes
Vous dont les cœurs transis ne sont qu'un long hiver
Et vous les chemineaux du fleuve et de la mer
Hommes au regard clair de tranquille courage
Cinglés de vent de pluie et flagellés d’orage
Vous dont l’âme dit va quand le corps crie assez
Vous les sanglants les sans-répit les harassés
Venez voici le feu votre haillon qui fume
Vous rend pareils aux Dieux environnés de brume
Revivez corps glacés bras morts pieds engourdis
Voici ô réprouvés un peu de paradis
Mains qui cherchiez une arme et poings crispés de haine
Calmez-vous c’est l’heure ouvrez votre fleur humaine
La flamme haletante avec ses reflets brefs
Sculpte vos traits puissants en creux et en reliefs
Faces d’argile enfin durcies ombre et lumière
Le feu vous a donné votre force dernière
Il a mis dans vos yeux comme un astre inconnu
Le reflet d’un soleil que vous n’espériez plus
Il est dans chaque flamme un envol d’oiseau ivre
Et sur chaque bûcher un saint qui se délivre
Regardez s’enivrant de sa propre ferveur
Le bois transfiguré dont Dieu a la faveur
Fagots en feu fumées envahissant l'espace
Dans l’odeur des forêts incendiées il passe
Diaphane déjà bientôt immatériel
De l’humain Caliban au divin Ariel
A elle-même votre âme s'est révélée
La flamme qui jaillit est le sang d'une plaie
Sur le charbon qui flambe et le métal qui fond
D’immenses brasiers roulent leurs feux profonds
Dans les lueurs dans l’or dansant dans l’air qui vibre
Ames et corps brûlez comme du bois la fibre !