Les chiens, les chats se font la guerre Ainsi que jadis et naguère Et les jeunes et les anciens S’aiment en fins platoniciens ; Les vieux ont pris le soleil et des rides En s’accrochant à la longueur des brides De leur monture galopant au vent Dès le blanc du jour au matin levant ; Les mômes ont vu leur chevauchée fantastique Alors qu’ils empilaient des cubes en plastique Et ils se sont juré : croix de fer, croix de bois De ne pas s’enfermer en hurlant aux abois. L’ancien s’est tourné vers le jeune : Vise loin, vis de peu et jeûne Et en chemin, viendra la faim Qui te suivra jusqu’à ta fin. Alors, d’accord, il ne prit qu’orge et seigle Et mincit sa gorge autant qu’un cou d’aigle Et mieux que Pégase il s’est envolé Sans avoir une aile au cheval volé. Le grand et le petit s’aiment toujours d’amour Comme le poids léger tourne autour du poids lourd ; Le premier a pensé terminer son voyage Quand l’autre n’absorbe qu’un quart du paysage. La guerre entre enfant et parent N’est qu’un phénomène apparent Car bien que minime est la graine Elle sera majeure reine Ou roi exécrant le roi fainéant Appliquant la loi du parfait néant Autour de sa molle et grosse paresse A tendre sa main pour une caresse Attendue du petit soumis à son sujet A l’égal attrait de ce merveilleux objet Auquel il a songé le jour, la nuit en rêve Et qu’il veut conserver jusqu’au jour où il crève D’avoir trop longtemps espéré Qu’il pût être un jour repéré Par le géant qui ne contemple Que les pilastres d’un grand temple… Alors, il miaule ainsi qu’un chat perdu Qu’aboie un chien seul d’amour éperdu ; Le malentendu déclenche la lutte Qui ne s’arrête que jusqu’à la chute Du plus fragile ou du plus sensible des deux Alors qu’ils eussent pu extraire en chacun d’eux Le meilleur qui bannit opposés, différences Si la cruauté s’est sauvée des apparences.