Plane en haut un condor Qui voit en bas qu’on dort ; Les têtes des maisons vont du marron au rouge ; Une ruelle tient un mur un peu penché Et disparaît puis se retrouve à la police Sans s’arrêter, sans se plaindre et lentement glisse Vers le temple où un homme âgé endimanché Est planté devant la porte et son corps mou bouge. Passe une auto puis deux ; Un cycliste merdeux Plein de boue tout partout debout sur une roue Saute sur le trottoir et rase un Doberman Qui tressaille de peur et accroche une dame Tenant son sac à main (comme ont tient à son âme) Qu’elle secoue en l’air quand un policeman Attrape le fou du deux-roues et le rabroue. Lentement, le bourg vit ; Le commerce est ravi Mais moins du temple nu que de la belle église Qui sonne la rentrée pour vendre la santé De l’esprit et sa paix jusqu’au prochain dimanche En prenant l’adhérent fidèle par la manche Heureux d’apprendre qu’il ne sera plus hanté S’il a l’obole mise au fond de sa valise ; Se distinguent du haut Les femmes en duo Qui tirent les rideaux des bureaux et s’invite Le jour chez les dossiers entassés sous les toits Serrés l’un contre l’autre enjoignant chaque tuile De ne laisser passer aucune goutte d’huile Et d’eau pour faire que les chats pourtant matois Glissent jusqu’aux chéneaux et jusqu’au sol plus vite. Un bruit lancinant sourd De l’épais magma lourd… Se promène autour de la ville une muraille Erigée sur une colline aux sapins fins Serrés l’un contre l’autre en câlinant leurs cimes Attachées aux forces plus que sérénissimes Des quelques racines drues au pouvoir non feint De maintenir le tronc droit quand la pluie mitraille La fragile cité Vierge d’atrocité. Le grondement augmente ; accourent les fourmis, Les vélos, les scootos et les automobiles, Les pailles en bouquets qui balaient les trottoirs, Les filles, les garçons malmenant les dortoirs, Jouant à de vilains jeux de mains malhabiles, Aux polochons volants qui n’ont pas le permis. Tout cela m’émerveille Et l’aimé maire veille Sur le condor qui n’a pas fini de tourner.