Non, je ne me sens pas encore vieux Bien que j’aie de la place dans ma bouche Et si mon ventre a grossi sous la douche Mes yeux bleus font de nombreux envieux.
Sûrement marché-je un peu lentement Et m’essoufflé-je après montée-descente D’une pente ardue et recrudescente A tirer en bas mon contentement.
Mes cheveux partis avant d’être blancs Furent recherchés entre Aubonne et Rome Sans réussite et je trouve accablant Qu’ils n’aient pas été saupoudrés d’arôme.
Mais, je n’ai senti pas le moindre mal Sinon d’avoir en tête assez la honte De ressembler au petit animal Aussi nu qu’un ver qui vit dans un conte.
J’ai baissé de vue, d’oreille et de nez Mais je touche à tout et souvent je goûte Le vin de noix que maman m’a donné Et qui glougloute dans son goutte à goutte.
J’ai peur de n’être plus intelligent En perdant le sens de la répartie Qui désarçonnait de nombreuses gens Incapables de gagner la partie.
Mais, j’ai compris que je dois être fort En luttant au corps avec la vieillesse Qui se plaît bien dans l’aise et le confort Assise avec moi dans la même pièce.
Quelquefois, elle a le dessus et j’ai La joie d’autrefois de m’affranchir d’elle Et cet hiver, je me suis allégé De cette compagne, ô combien fidèle.
Un matin couvert d’un tapis de neige, J’ai descendu à skis le grand tremplin Et la vieillesse a remarqué : « que n’ai-je Quelqu’un qui jamais de moi ne se plaint. »
(Je ne dis rien mais n’en pense pas moins Car parfois elle me colle aux chaussures Et j’ai confessé à deux trois témoins Qu’elle m’a causé souvent des blessures)
Dorénavant, j’ai remis les compteurs A zéro pour le reste de l’année Emparée avec soin par mes conteurs Qui la diront au point ou surannée.