Le ciel est bleu, la mer est verte Et Jeanne avec ses yeux vairons Garde sa maison grande ouverte Aux goélands blancs qui verront Qu’André assis sur le perron Dissimule sa découverte ;
Par chance, la cuisine est sombre Et les oiseaux ne peuvent voir Qu’un trait de lumière dans l’ombre Enveloppant un réservoir Dont André est seul à savoir Ce qu’il contient en très grand nombre.
Et sa femme, Jeanne, elle-même, Remarque si peu cet objet Que son mari songe « elle m’aime Tant qu’elle n’a pas le rejet De ce qui n’est qu’un non-sujet Rempli de cristaux de sel gemme.
Une oie sauvage et une mouette Rasent l’homme assis sur le seuil Et l’air brassé d’un seul coup fouette Son visage tanné ; son œil Reste ouvert et montre un orgueil Egal au regard de la chouette.
Il entend chanter : « dis, je sale La raie avec un cube Knorr ? Quelle belle arête dorsale Donne aux poissons la mer du Nord Valant une culotte en or Qui rend beau un derrière sale. »
- Un cube Knorr fait par un Suisse Qui ne sait pas ce qu’est le sel ! Ah ! Je me tape sur la cuisse Et appelle-moi donc Marcel Car je suis le roi du recel De gemme et la mer est complice.
- Pourquoi évoques-tu ta mère Qui utilise du raifort Rendant sa cuisine aigre-amère Et afin que ce soit très fort Elle ajoute du roquefort Issu de la glande mammaire
De la brebis ; ça te fait rire ? » - Ah oui, je ris à en pleurer Et surveille ta raie à frire En veillant à bien la beurrer Car rien ne peut plus m’écoeurer Que l’eau d’un poisson qui transpire.
Mais surtout n’oublie pas que j’aime Le meilleur rehausseur de goût Mis au secret : c’est du sel gemme Que cherche à voler le grigou Pour améliorer un ragoût Ou même une raie à la crème.