Il est là dans son coin sage et silencieux Et son guidon me dit : dis, on part en balade Je vois à travers la vitre de si lents cieux Que leur bleue promenade est une régalade !
C’est ainsi que parle un véhicule excité A prendre son pied comme un gros gastéropode Qui veut aller mettre son nez dans l’ex-cité Devenue dans ses rues férue du gyropode.
Je mets donc mes pieds sur chacun de ses côtés Et m’accroche aux poignées, mes fesses sur la selle Apprécient le cuir que l’on dirait tricoté Avec une aiguille fine et de la ficelle.
Et me voici parti le long du Doubs à vingt A l’heure en empruntant une piste cyclable Qui heureusement ne borde pas un ravin Car l’engin est instable et n’est pas recyclable.
Aussi, n’est-il pas plus rapide que les cieux Dont la partie de bleu presque immobile semble Et mon gyro comme eux au bruit silencieux Rêve de leur parler pour voyager ensemble
Mais, pour l’instant il doit veiller à l’escargot Qui traverse l’asphalte en glissant sur sa bave Et je ris de lui en disant dans mon argot Alors, mon petit gros, tous les deux on en bave
Les fleurs se découvrent en me voyant passer Le cycliste voyou me frôle et plus me rase En ayant en pensée de me voir trépasser Et je prie pour que son idée vile l’écrase.
Les promeneurs rient ou se moquent gentiment D’autres marchent avec la moche jalousie Et finalement, j’ai en cœur le sentiment Que chacun ne lit pas la même poésie.
Et après quarante kilomètres, me dit Mon gyropode dans ma roue vient la fatigue Et ma pile vide finit sur samedi Dimanche on ira sur le Doubs franchir sa digue.