Je suis de tous les temps, à la fois homme et femme, L’océan que tranche la vague avec sa lame, Un Père intempérant qui commande aux hivers Et aux braises d’Enfer brûlant les univers.
Mon nez fut le premier à respirer l’aurore Alors que le matin n’existait pas encore ; Je suis l’avant, l’instant, le présent, le demain, Celui qui va sans cou, sans tronc, sans pied, sans main.
Je suis la terre, la substance et la semence, La demeure où la fleur croît sous un ciel immense, Le grand corps éternel qui contient tous les corps, Qu’on les dise vivants ou qu’on les dise morts.
J’adosse l’échelle bleue au soleil vermeil Qu’emprunte l’ange blanc quand Dieu est en sommeil Et fais couler le sang de l’agneau dans les veines Des damnés pour que leurs larmes ne soient pas vaines.
Je suis l’âme qui part pour d’infinis voyages A la découverte d’âmes du fond des âges Qui, aussi déroutées, ne sont pas dupes, savent
Mentir si puissamment qu’elles – sèchement - bavent Sur l’épaisse morve des inhumanités Vouée à les engluer aux éternités.