Ce matin, je fais halte au détour d’un chemin Où se dresse, isolé, un modeste oratoire Bâti de pierres grises taillées à la main ; Une grille de fer cadenasse l’Histoire.
Dans l’espace réduit, trône une menue vierge Légèrement penchée sur Jésus l’enfant-roi Et de chaque côté, se consume un grand cierge Dont la flamme essaie de réchauffer l’endroit froid.
Une horloge de bois accrochée au fronton Dont l’unique aiguille donne un signe de vie Est couronnée d’une croix où le rejeton A les membres cloués et la bouche bleuie.
Et puis, tout au-dessus, en caractères noirs : « Après le jour la nuit arrive la dernière » Je mastique la phrase à la tombée du soir, En pensant au petit creux assis sur l’ornière.
Ainsi donc, le combat ne cesse et nous entraîne A lutter forcément contre l’âme invisible Qui crochète les pieds tombant dans la géhenne Sans pouvoir remonter dans l’espace paisible
Où la mer est étale et remplie de sirènes Qui oh n’est pas l’unique à nous faire périr Il en est de même pour les rois et leurs reines Qui croient que l’avenir peut guérir du mourir
Alors, si c’est ainsi, pourquoi sommes-nous nés ? Marie, portant son fils de ses bras qu’on ôta Ne sait pas, ne sait si son petit déifié A bâti son calvaire en bas du Golgotha.
Pendant trente trois ans, le cadran triomphant Ne s’arrêtera pas jusqu’au jour du scandale Où Ponce condamna un homme encore enfant A mourir les mains nues et les pieds sans sandale.
Grande innocente, la mort déteste la mort Et chérit le vivant qui attend le trépas. Elle rode, serpent, qui siffle et qui le mord Soigneusement pour qu’il constitue son repas.
La morsure est profonde et la plaie est féconde ; Le chasseur sonnera l’hallali de son cor ; Dans l’horloge éreintée, l’implacable seconde Supplicie le cadran en passant sur son corps.
L'âpreté du temps, la chaleur et la froidure Condamnent sans appel la dureté du bois Ainsi que le Messie au supplice qui dure En offrant son sang rouge à celui qui le boit.