On se souvient de cette chèvre Dont le tempérament sanguin Causa sueur, angoisse et fièvre A son très cher monsieur Seguin.
Son ventre pend à terre et guigne la bedaine ; L’herbe grasse et tendre ne la rassasie plus. Son étroit carré lui donne l’envie soudaine De changer de côté pour soigner son influx.
L’enclos n’est pas infranchissable Au grand coup de reins de la chèvre ; En saute-mouton impeccable Elle atterrit tout près d’un lièvre.
Les voilà gambadant, distraits, joyeux, follets Et décident de faire un peu mieux connaissance ; Le lièvre agite son nez avec insistance Et la chèvre lui tend ses pis gonflés de lait.
Derrière une épaisse cépée Le loup cache ses crocs-épée Et attend l’instant fatidique Pour manger le lièvre et la bique.
Le prédateur surgit, la bave à la babine Et nos amis surpris par l’horrible bobine Flairent un grand danger. Ysengrin plein de foi Veut manger ses deux proies en une seule fois.
Le rongeur en deux bonds détale Pour éviter l’issue fatale Mais le chasseur vif et puissant Le rattrape et le mord au sang.
Le lent caprin presqu’à l’arrêt Est d’un coup croqué au jarret. La paire plaît au carnivore Qui sans attendre la dévore.
On fronce les sourcils face à ce choix facile De folâtrer gaiement en défiant Satan ; Gare à celui qui veut quitter son domicile Car le méchant est dans le champ et il attend.