Sinuant entre les maisons qui se font face, Le serpent de goudron sombre suit son chemin Et quand l’alignement des hauts remparts s’efface En laissant la place à l’œillet et au jasmin
Croissant là devant le fer forgé d’une grille Qui barre l’accès à l’allée d’une villa Si blanche que le gris aigri reptile brille De son dos fourbu qui envie cette vie-là
Dont le cheminement lent dû à l’étroitesse Du passage que lui réserve la cité Qui a construit ses murs pour pousser la vitesse Hors de chez elle du cinglé, de l’excité,
Devient aérien, il s’en donne à cœur joie, Respire la brise tiède et le vent très frais, Salue sans s’arrêter, fermière, cane et oie Mais continue, hélas, à s’arranger du fret.
Reptile de ville changé en crocodile Toujours sous le joug fou des prédateurs rugueux Le prenant peut-être pour un asticot d’île Venu sur le sol dur se mêler aux fougueux
Assassins heurtant le calme de la campagne Dans un bruit d’enfer qui fait se courber les blés Aux épis blonds comme les bulles de Champagne Pétillant devant les convives attablés.
D’avancer l’animal – normal - en ligne essaie Mais son déhanchement l’entraîne à slalomer Entre le champ herbeux, le verger, la saussaie Au dam de ses dompteurs qu’il vient à dégommer.
Il redevient orvet en entrant au village Et retrouve les murs des maisons (sa prison) ; Le calme équivoque de la nuit le soulage Même si file au lit, aussi, son horizon.
Dès l’aurore, le zoo, dans la plaine rurale Reprend ses errements : les serpents, les dresseurs ; L’intelligent comprend alors que la rue râle, Ereintée par le port sur son dos d’agresseurs.