Ah ! moi, je suis sage, c’est certain, je le dis, Je m’attache à la règle, aux préceptes de vie ; J’observe les écrits dès l’aube du lundi ; Je fais fi des avis et jamais ne dévie.
Je n’abuse de rien et ne crie jamais fort, Je respecte le mort autant que l’âme vive ; Je sais faire le bien et n’entasse pas d’or Et après que je dors, j’invite le convive.
Mon mérite vient du philosophe Aristote Qui m’a donné la clé avec tout son trousseau Ouvrant les boîtes qui contiennent l’antidote A mon égarement quand je pense à Rousseau.
Je ne m’abaisse pas à vénérer des Dieux Créés dans leur entier par le monstre chimère ; Cartésien de bon teint, j’adresse mes adieux Au monde crédule, ridicule et primaire.
Je ne peux supporter un faible esprit qui mêle Des idées préconçues avec la Vérité En affirmant que le mâle est une femelle A l’âme noire dont il aurait hérité.
Je sais faire le choix qui maintient l’équilibre Entre le dérapage et la grossière erreur Et, modestie à part, je reste un homme libre Face au charabia de l’arrogant discoureur. »
Ma foi, qui se croit sage est assez dérangé Car déjà de le dire est une outrecuidance ; Le cœur avec l’esprit doivent s’être arrangés Pour ouïr un verbeux avec grande prudence…
Nul besoin de manger des centaines de pages Pour différencier Satan des angelots ; Nul besoin de presser les seins dans les corsages Pour savoir si coule du lait chaud ou de l’eau.
Le plus sage des fous admet que la folie Moquent les maîtres aux tics comportementaux, Ces malades mentaux guettés par l’embolie Si pendus au crochet d’un vieux porte-manteaux.
Einstein et De Vinci, le savant et l’artiste, Ont propulsé le monde avec aménité Sur les plus hauts sommets où le parachutiste Salue la montagne vieille d’éternité.
Le fou est un génie, le génie, peu ou prou, Est un fou qui cultive au jardin la pensée Eclairant la noirceur du dangereux gourou Prônant impunément la Sagesse insensée.