Vient toujours le sourire au voisin du premier Qui n’est jamais dernier à vous ouvrir la porte Du magasin qu’il tient comme ouvrier-crémier Attendant le chaland même s’il l’insupporte
Ma femme que je n’ai jamais eue m’a redit Qu’il monte le panier de la vieille au deuxième Le matin vers midi et chaque vendredi Quand moi-même je n’en fais qu’un maigre dixième
Vincent Pacaud l’a vu donner à Marie-Claire En cachette quelques yaourts aux fruits divers Et dans ces moments son front semble-t-il s’éclaire Jusqu’à terroriser les nuits glacées d’hiver
René le boulanger l’aime mieux que sa pâte Pétrie avec soin à la main dès le matin Et il est bienheureux quand il voit qu’il s’empâte Par son pain au levain, par sa tarte Tatin
Il chante à la kermesse, à la messe, au banquet Et il imite avec talent des voix de France Ma fille que je n’ai jamais eue lui manquait Quand le blouze* souvent la met dans la souffrance
Je ne sais ni son nom ni comment il s’appelle Mais sa veste ayant un point rouge à son revers Signifie qu’il n’a pas par sa pioche et sa pelle Tracé un long sillon même un peu de travers
Le seul ami que je n’ai jamais eu m’a dit Qu’il fait dans le pays des sommités partie Et qu’il a sûrement connu Mespley Mady Qui bizarrement n’est pas avec lui partie
Le voisin du premier a toujours le sourire Et il bénévole au populaire secours Son fils qu’il n’a pas eu aurait pu me décrire La joie de papa quand sa proie crie au secours
Il me viole et m’égorge et pourtant tant je l’aime.