Les carreaux sont des murs dont on voit à travers, Tellement transparents qu’on doit les voir en verre Laissant presque passer la pluie, la primevère Et le soleil séchant l’if poussant de travers.
Et ces invertébrés qui aiment la lumière, Les gerbes de roseaux au pourtour de l’étang, Le linge blanc quand le Jean sur le fil l’étend Partagent avec la Jeanne dans sa chaumière.
Ils vont deux par deux bien casés dans la fenêtre, Se tiennent à carreaux lorsque s’approchent d’eux Des enfants leur jetant deux ou trois paires d’œufs Qu’ils salissent sans que leur traînée ne pénètre.
Ils captent des cailloux destinés aux passants Qu’ils tentent d’arrêter de toute leur puissance Mais n’ayant pas été créés à leur naissance Pour subir de tels maux, ils cèdent en cassant.
Ils croient se protéger en se parant d’un voile Qui ne peut servir qu’à masquer leur nudité Et ce rideau léger dans sa timidité Accepte l’entrée de la clarté d’une étoile
Mais aussi givre et vent, les yeux inquisiteurs, Le bec du pic-vert et la serre du rapace Sans compter qu’il se peut qu’un vrai scélérat passe Aidé en cela par l’art de dynamiteurs.
Quelques soldats de fer alignés en barreaux Debout, vigilants, sans bouger, montent la garde En rassurant cette dame qui les regarde Soulagée qu’une armée veille sur ces carreaux.
Aussi, s’ils sont cassés, souillés ou violés, S’ils ne peuvent donner à voir la vie si belle, Les carreaux martyrs ont un sentiment rebelle Et pleurent derrière des volets violets.