Quand ils arriveront jusqu’à un million Sans crainte du tigre, du serpent, du lion, Je les prendrai dans mon chez moi ; Ils auront dit adieu au désert, à la plaine, Au mont vertigineux qui craint la mer d’eau pleine Pour s’abriter là sous mon toit.
Je sècherai les pleurs de chacun de leurs yeux Qu’ils ont tant versés sur le sol de leurs aïeux, Sur leurs coutumes et leurs lois, Dans le lait de l’ânesse ou le vin de la vigne Qu’ils buvaient d’un seul trait dans un grand geste digne Car bien que gueux, ils étaient rois.
J’entends déjà gloser : « Et que fais-tu des autres ? Voudras-tu rappeler aussi les douze apôtres ? » Et je leur dis, de bon aloi : « Le pèlerin qui vient aura tout mon verger Où les fruits sont gardés par mon humble berger Qui a toujours su son emploi. »
« Un berger surveillant des pommiers dans un champ Alors qu’est à l’affût un animal très méchant, Le loup qui hurle au crépuscule ? » - Mais, mon berger n’a pas de moutons en troupeau, Ni chèvres, ni brebis, ni vrai ni faux appeau : Il n’a qu’un pipeau minuscule. »