S’il n’a pas le bac suivi de plus six Son potager a cent pieds de salade Qui croissent entre radis et cassis Sans avoir rendu personne malade.
« Je sais retourner, sillonner, biner La terre noire à qui je donne à boire Et sans me presser mais sans lambiner Je sème assez pour surseoir au déboire. »
Il eut aisément son certificat D’expert jardinier en belle laitue Qu’il soulève d’un geste délicat Quand le profane l’arrache et la tue.
Il n’obtint pas le baccalauréat Mais décrocha le soleil et la lune Qu’un Dieu méconnu aux doigts d’or créa En donnant à l’un ce que n’eut pas l’une.
Son métier s’achève au pied du grand soir Quand vient le voir son ami rouge-gorge : « Petit homme, il est l’heure de t’asseoir, Moi, je vole et toi tu t’appelles George
Courbé sur le sol en parlant à la Plante muette et que tu sais sensible A ta voix ainsi qu’à celle d’Allah Trouant le cœur qui se croit invincible.
Il n’est pas besoin de passer le bac Quand l’enfant apprend la langue des anges Qui s’écoute dans une oeuvre de Bach Et dans le chant des pinsons, des mésanges. »
Le volatile cligne alors des yeux Et se pose sur une feuille verte Qu’il découpe un peu et l’emporte aux cieux Où le paradis a sa porte ouverte.
George retourne à sa maison sans rien D’autre que des pleurs intérieurs que verse Son âme pure de naïf terrien Qu’un échange avec l’oiseau bouleverse.
Si George s’était fait nommer Armand Et l’oiseau si beau merlette ou fauvette Les deux trouveraient sûrement charmant Qu’une salade s’appelât Yvette.
Pour le rouge gorge et George les vers Ne sont beaux et bons que vivant en terre Au chaud, bien couverts, étés comme hivers Et déshabillent Malherbe et Voltaire.
Si la vraie culture appartient aux champs, Tua le bouillon de Louis la rage ; Les savants ne sont pas des gens méchants Mais voudraient faire barrage à l’orage.
Lui, possède un bac rempli de bonne eau Qu’il sert à boire à ses plantes paisibles Et sait qu’il n’est qu’un pauvre péquenot Au comportement incompréhensible
A l’esprit fin des cadres diplômés Installés dans la strate supérieure Conscients, pourtant, de s’être formés A élaborer la graine meilleure.