Que retiendrai-je de ma vie qui se termine En me laissant le temps De mirer la beauté de ma toison d’hermine Au-dessus de l’étang Où je me suis rendu avec ma canne à pêche Lundi après-midi En ayant emporté dans ma poche une pêche Qui venait du Midi Et dans mon sac une bouteille bourguignonne De vin aligoté Que j’ai sifflée avec une cane mignonne Qui m’a ravigoté. Après le fruit juteux, j’ai convoqué la sieste Pour un peu m’allonger Auprès d’elle et posée la tête sur ma veste J’entendis « plouf » plonger… Je me suis relevé pour regarder Marie Nager dans cet étang : « Yohanân, tu n’es pas si vieux, on se marie ? » - Viens, remonte, on s’étend ; Ma sieste est repartie ; j’ai bientôt septante ans Mais mes mains et ma bouche M’interpellent : dis don’, la Marie, c’est tentant D’autant – sûr – qu’elle couche ; Alors, elle est venue, lisse autant qu’un poisson Et j’ai jeté ma ligne A l’eau, je m’en fichais, j’avais fait ma moisson D’une fille maligne Qui avait retardé le jour de mon départ De manière superbe ; Ainsi, je me fis – Dieu merci - inondé par Une jeunette en herbe Et je retiendrai de ma vie qui va finir Qu’un jour une sirène Est sortie d’un plan d’eau afin de devenir Pour une heure ma reine.