Quand sur la ville pèse un air lourd et poisseux Et qu’il est malaisé d’aspirer une goutte De fraîcheur pour calmer le front graisseux, pisseux, Salé d’une sueur que la bouche bée goûte
Le ciel est supplié d’envoyer une averse, Une ondée, de l’eau fraîche et un petit grêlon Mais pas d’orage et rien d’autre qui se renverse Pour ne pas exciter l’abeille et le frelon
Qui habitent dans les greniers chauds des maisons. La bagarre, là-haut, semblerait-il, commence. En bas, si Dieu n’est pas, restent les oraisons : Oh ! Que la sagesse ait raison de la démence !
Mais, pas de tonnerre et encore moins d’éclair ; Seul, un nuage gris-noir apeuré détale Devant un vent vif en ouvrant un carré clair Sur la voûte céleste et tout l’azur s’étale.
Agen attend de l’eau et jalouse Toulouse Qui rosit de plaisir sous la froide chaleur Tranchant sur l’habit rouge et noir d’une Andalouse Au visage d’une épouvantable pâleur.
La perle du midi moins le quart se ménage Alors que la place du Capitole agit Avec le glaçon qui dans l’anisette nage En domptant le gosier promptement assagi.
S’entend chanter dans la campagne le grillon A moins que ce soit la cigale de Provence ; L’air est si sec que le parfum d’un taurillon Fait dire à tous les nez : l’été est en avance.
La ville, ramassée sur elle s’est ouverte Et ne peut – c’est tant mieux – d’alentours s’affranchir ; La vallée du Rhône a une colline verte Et rien n’interdit le mistral de la franchir.
Et le jour où la pluie décide de venir Visiter Saint Etienne ou la plaine agenaise, Les Marseillais seront d’accord pour convenir Qu’on ne saurait remettre en cause la Genèse
Car la création voulut que les oranges Fussent à Cordoba, le vin rouge à Bordeaux Mais, les Parisiens aux têtes de chiens étranges Disent que la brise souffle sur leurs bords d’eaux.
Ainsi, sont des saisons, des temps de sud, de nord, De ski à Chamonix et de surf à Bayonne Et pourtant entre Morre, Avanne et Le mont d’Or Le soleil est pareil qu’en Andorre et dans l’Yonne.
Pareille est la neige à Oléron et à Garges Comme la campagne et la ville ont des odeurs Qui flottent autour des femmes aux hanches larges Pour aux hommes donner de si belles ardeurs.