Tant est tentaculaire et tant est titanesque Un monstre arrivé dans un cauchemar Du genre louvet noir ou calamar Vu dans un conte ou une histoire romanesque
Que la journée rend l’esprit malaisé En découvrant dans l’herbe une chenille Onduler pendant qu’une cochenille Piétine et que rampe un ver dans un sol glaisé.
L’aube a des haleines de givre et de froidure Qui glacent les sangs dans les pulls mohair Et tremble la peau protégeant la chair De même qu’endure la glabre et nue verdure.
Le crépuscule a de petits cris de grillon Que la nuit aspire à petite dose Quand monte en juin un arôme de rose Au pied d’un baobab où dort un négrillon
Qui rêve de blés blonds, de cerise et de Seine, De Toulouse et de Ioutou à Bercy Où l’amoureux du palais dit merci De le balconiser en face de la scène.
Bel Africain, aux dents blanches, le cauchemar Est le décadent occident qui souffre D’avoir oublié qu’il existe un gouffre Où grouillent araignée, langouste, crabe, homard
Prêts à le dévorer ; il nie que la crevasse Laboure les mains en fin de janvier Mais avril n’est pas plus à envier Et l’été a la fleur de l’angoisse vivace.
Le cauchemar et le rêve s’aiment la nuit Pour que la tête du dormeur s’amuse Qui se réveille en pensant « que ça m’use Ce constant va-et-vient entre joie et ennui »
Dans le noir circule le drap blanc du fantôme Enveloppant un monstrueux corps mort Ou une bête qui griffe et qui mord Le sujet dont la souffrance est le vrai symptôme
Des cataclysmiques accointances du jour Avec la laideur dont il s’accommode (La beauté étant morte et hors de mode) Et en hésitant à s’accrocher à l’amour
Qui demeure le point, l’objectif à poursuivre Quand envahit la peur l’âme et le cœur L’épouvantement du monstre moqueur
Grimaçant en singeant la murène et la vouivre Eloignées, hourrah, des cornes d’aurochs Perceuses de peau, pareilles aux rocs.
Tant est titanesque et tant est tentaculaire La pieuvre géante et le calamar Que ne présenta pas le cirque Amar Tant l’horreur sur terre est aussi spectaculaire.
Si le regard a le savoir que dans le noir Se déplace une vie interminable Sous les traits d’une faune abominable
Qui conquiert âme et cœur dès qu’approche le soir En ricanant dans un rire minable, Le jour montre un monstre inimaginable.