Vos
poèmes

Une araignée tisse sa toile,
L'air de rien, au bout du chemin,
A l'heure où brillent les étoiles,
A la croisée des lendemains.

Tapi au fond de sa demeure,
Sans maîtrise sur le destin,
Patient, le monstre attend son heure
En accumulant son venin.

Il sait la force des orages
Et la ténacité du vent
Qui, dans les fils de son barrage,
Viendront jeter les imprudents.

Il parie sur leur ignorance,
Leur folie, leur aveuglement,
Leur surdité, leur insouciance,
Inexpériences du printemps.

Il avance et puis il recule.
Il peaufine son piège noir.
Il aiguise ses mandibules.
Qu'elles coupent comme un rasoir !

Par tous les fils joints à ses pattes,
Il sait les flux et les reflux
Qui affolent cœur, sexe et rate
De ses proies qui n'en peuvent plus.

Nul ne dira qu'il est coupable :
Il ne fait qu'engranger les peurs,
Laissant le temps seul responsable
Du mûrissement des stupeurs.

Et toutes ses pauvres victimes
Viendront s'engluer dans ses rets
Dans une folle course ultime
Qui signe de leur mort l'arrêt.

Affolée par les vents contraires,
Avec ses yeux exorbités,
La multitude solitaire
Sera bonne à exécuter.

En rangs serrés, foule compacte,
Comme les bœufs à l'abattoir,
Abrutie par le dernier acte,
Elle sombrera dans le noir.

On croit que brillent les étoiles
A la croisée des lendemains,
Quand l'araignée tisse sa toile,
L'air de rien, au bout du chemin.