Qu'imagines-tu donc si je te dis printemps ? Une prairie en fleurs ? Des filles de vingt ans ? Un début prometteur pour un nouveau pécule ? Un enfant pourchassant Quelque bleue libellule ? Qu'imagines-tu donc si je te dis printemps ?
Mon printemps se conjugue au conditionnel type Ce peut être très cher, ce peut être gratuit C'est la pleine santé, c'est la mort par la grippe Ou tout sera par terre, ou tout sera construit.
Si je te dis été, qu'est-ce que tu comprends ? Est-ce un pays brûlé ? Une mer sans courant ? Un soleil saharien ? Un temps de canicule ? Un ciel resplendissant Où joue le crépuscule ? Si je te dis été, qu'est-ce que tu comprends ?
L'été, pour moi, ce n'est qu'un pauvre participe, Un passé composé de bonheurs qui ont fui Où l'étoile n'est plus qu'un soleil de principe Soulignant d'un point d'or la noirceur de ma nuit.
Si je te dis automne, en toi, ça fait comment ? Quelque berge mouillée au bord de quelque étang ? Une vieille endormie au fond d'un vestibule ? Et le soir qui descend ? Et le jour qui recule ? Si je te dis automne, en toi, ça fait comment ?
L'automne et tes coups bas font une travail d'équipe. Nos fruits tombent au vent d'hier et d'aujourd'hui. L'angoisse sourde naît, enfle, annonce, anticipe L'irréparable outrage à un parfait détruit.
Si je te dis hiver, qu'est-ce que tu entends ? Est-ce un pôle glacé ? Une neige d'antan ? Un nez rougi de froid ? La potion ? La pilule ? Une axe routier blanc Bourré de véhicules ? Si je te dis hiver, qu'est-ce que tu entends ?
L'hiver, la bise mord et mon cœur et mes tripes. Je cherche en vain le feu qui s'est éteint : celui Où brûlait un amour, et n'ai plus que ma pipe Pour réchauffer mes mains à son foyer de buis.