Descendons l'escalier de l'impasse des songes ! La vie n'y connaît ni la peur ni le chagrin. Les camelots soldent leurs rires sans mensonges Avant d'aller gaiement traîner au boulingrin.
On y verra leurs joies drapées des arcs-en-ciel Qui jettent des flambeaux et disent des bonsoirs. On mangera des pains qui ont le goût de miel Et parfument les murs, les toits et les voussoirs.
On croisera des vieux qui portent des casquettes, Discutant sur les bancs, la canne entre leurs mains. Les montres aux goussets, moustaches et rouflaquettes, Parlant d'un avenir rempli de lendemains,
Des petites mémés qui sourient, impudentes, En voyant un ténor en costume argenté Chanter la mélopée de ses amours ardentes Sur un rythme bizarre et même déjanté.
On ira rire avec les gosses de l'impasse En jouant à la marelle ou à colin-maillard. On se taira un peu si, par hasard, il passe Un cortège de pleurs derrière un corbillard.
On cueillera les fleurs poussant sur le trottoir Pour en faire un bouquet qu'on offrira à celle Qui dansera le mieux, debout sur le comptoir, Une danse du ventre au son d'un violoncelle.
Quand on arrivera tout au bout de l'impasse, On fera demi-tour pour rejoindre la vie. On fermera les yeux pour que la nuit repasse Le film de cette impasse où plane notre envie.