Assise devant la toile blanche Tel un artiste mal inspiré, Regardant l'écran je me penche Sans savoir comment le toucher. Les couleurs dansent sur la palette Elles esquissent des milliers d'idées, Mais sur aucune mes yeux ne s'arrêtent Confuse mon regard est brouillé. Le choix des formes inaccessibles A mon esprit trop perturbé, Me paraît aujourd'hui impossible, Aucune couleur ne peut coller. Chahutée par le sentiment terrible De ne plus pouvoir réparer, La peur d'être à nouveau la cible De mes erreurs incontrôlées. Que faire devant cette toile blanche Qui ne demande qu'à respirer ? Faut-il appeler quelques anges Pour qu'ils m'aident à la commencer ? La peur de salir l'image Paralyse mes mains qui s'éteignent; J'aimerai bien tourner la page Pour que la confiance revienne. L'angoisse de la tromperie De mon esprit mal informé Pourrait faire renaître le pire Ternissant la toile à jamais. Je me sens comme une moribonde Devant l'accomplissement du passage, Je me sens comme une colombe Immobilisée dans une cage. La vision de la toile est là, dotée d'un lumineux éclat; Elle me regarde avec amour Et me glisse doucement à l'oreille :
"Soit patiente et attend ton tour, Tu peindras alors une merveille ; Car le temps est au nettoyage Et l'attente semble bien plus sage. Il faut d'abord que tu déblayes Les fantasmes nés de vieux schémas, Que tu jettes dans la corbeille Les vieilleries qui freinent tes pas. Ensuite seulement prend ton pinceau, Il saura te guider à nouveau ; Il t'emmènera vers les couleurs, Tu pourras ainsi peindre l'aurore. Calme toi donc ma douce amie Et tu sauras que faire de ta vie".