Chère, te souvient-il du temps des amourettes, Alors que je prenais dès l’école ta main Pour, aux Petits-Jardins, cueillir les pâquerettes Ou… plutôt sur ta bouche en baisers le jasmin ?
C’était l’hiver, malgré la pluie ou la froidure Qui nous accompagnait, guides inopportuns, Je trouvais la chaleur sous ta cape en fourrure Et pâmé respirais dans ton cou tes parfums.
Le banc, hôte de tant d’idylles anonymes Et complice muet des serments éternels, Nous réservait ses soirs : les murmures intimes Se mêlant à nos corps dans leurs élans charnels.
Ce qui, par la jeunesse, instable et courte flamme, N’aurait pu devenir qu’une aube sans éclat, Se mua lentement : lorsque tu devins femme, Au foyer de nos cœurs l’amour étincela !
Et l’ardeur ne fut point comme une régalade Qui se consume vite et sans chaleur, ses feux Posèrent sur nos chairs les mots d’une ballade Dont nous chantons toujours l’envoi voluptueux.
Car après quarante ans d’existence commune Et deux fruits féminins mûris sur le chemin De nos étés, je suis l’océan, toi la dune, Cote à cote l’on reste unis jusqu’à demain.
Alors que nous passons dans le bois de l’automne, Que le froid se profile à l’horizon blafard, A l’abri de ta vie encor je m’abandonne Et te dis simplement que je t’aime, sans fard.