Paris je t'haine lorsque retombe la brume Et que le jour s'efface pour que renaisse Au clair de lune le carnaval désincarné D’envies mortelles, visions toxiques Qui à l’instant transforment nos cœurs En réseaux vastes et caverneux, Lacérés sur ses murs par des cris d’extases Et de douleurs, souterrains sans lumière, Profonds jusqu'aux rivières de sang Qui charrient des corps assoupis Par les vapeurs du désespoir
Ils et elles s’en vont, flottant à la dérive Comme des plaques vers les nouveaux continents D’une capitale sous la neige.
Paris la nuit, c’était ce triangle des martyrs, La jeunesse de Guy Môquet sur la place de Clichy Pour finir défoncé à la porte éponyme, C'était l'ilot chalon des robinsons Chaque vendredi pour nous casser une tête Trop pleine de racines carré, C’était les bataillons de Stalingrad, Les canaux sales de Riquet ou les discours De Max Dormoy pour faire rougir Toutes les pucelles Sur le chemin de La Chapelle.
C’était notre sélection naturelle Faite d’artifices, c’était Paris Chaque nuit jusqu’au petit matin, Pour le voir elle, transie par le froid, Prendre sa place après le tapin d’une nuit sans tuile, Dans son lit jaune, grinçant et cafardeux, Le fond du cul interstellaire d’un vieil hôtel.
Mais elle s’en fout, elle est enfin allongée Ma belle, sa queue avec, Tu vas pouvoir enfin rêver de devenir un jour Un maître en alchimie, l’ogresse qui régnera Sur tout ce peuple du château-rouge Sur ce marché des gouttes Qui transformera toujours Et pour toujours le sang des affamés en or…