Duel
Cercle noir, puissance de la nuit,
Gouffre obscur et sans fond d’où ne luit
Aucune lumière ni lueur ;
Seule, une étouffante profondeur
De laquelle jaillit une flamme
Noire, ombre d’elle-même elle entame
Peu à peu les parois de ce gouffre,
Toujours plus profond elle s’engouffre
Jusqu’à dévoiler du grand sommeil
Cercle blanc, puissance du réveil,
Blanc pur éblouissant, contrastant,
Océan ces ténèbres serrant.
Blancheur bordée de filaments sombres,
Longs cils enveloppant de leurs ombres…
Quoi ! Le temps d’un éclair et puis rien,
Un clignement ; noir et blanc sans lien
Auparavant, se sont confondus,
Le temps d’un instant, se sont fondus.
De nouveau, un gouffre noir, contour
Blanc et des cils sombres tout autour.
Ilôt au centre de ce visage,
Les cils sont pareils à une cage
Derrière les barreaux de laquelle
Cet œil, dont le regard interpelle
Face à lui un autre œil, identique,
Une même étincelle caustique.
Se défiant l’un et l’autre ils font face
Attendant un geste, une menace.
Menace présente qui s’impose
Dans un lourd silence elle repose.
Elle est ce mauvais rictus de haine
Qui déforme la bouche et l’enchaîne.
Elle est cette goutte de sueur
Tombant lentement telle la peur
Le long de cette joue molle et jaune.
Elle est dans cette pièce, elle trône.
Ils sont là, debout dans la pénombre,
Prêts à devenir la proie de l’ombre
S’il faut attendre ; prêts à agir
Si on leur demande de mourir.
La main tendue, la jambe devant,
Le corps entier penché en avant ;
Leurs deux regards se sont accrochés,
L’un de l’autre ils se sont approchés.
Dans cette étroite pièce étouffante,
Dans laquelle la vie semble absente,
Ils ne sont plus hommes, ni vivants :
Ce ne sont que des objets mouvants.