Sous le Pont Neuf, aussi, on voit couler la Seine ; Le Pont Neuf plus si neuf mais toujours plein de charme. Sur lui vont les passants, les amours souveraines, Les peuples révoltés criant « prenons les armes ! »
Ses larges flancs ornés de grimaçants satires Etaient devenus noirs, mais notre République Respectant ce qu’un Roi avait voulu construire, Leur a rendu un lustre et une aura magiques !
Chevauchant la cité, enjambant la rivière Aux deux bras langoureux, il regrette le temps Où quelques boutiquiers faisaient quelques affaires Au dessus des flots gris, en hélant les passants.
J’aime à le voir, la nuit, face à la Tour Eiffel Sa rivale superbe ; illuminés tous deux, Ce sont deux fleurons d’or de l’art universel. Sur son dos, bien souvent j’aime à rêver un peu, Et je ne sais pourquoi je m’envole à Venise… Je m’accoude au rebord et m’y voici d’un coup ! Je verrais bien ce pont qui voit la Seine grise Dessus le Grand Canal…ce rêve est-il pas fou ? Je le verrais aussi quelque part en Bretagne Quand au dessus de moi la mouette vagabonde Pousse son cri aigu ! L’enchantement me gagne… Surtout si près de moi rêve une belle blonde.
Sur son cheval de bronze, Henri quatre, dressé Regarde les passants avec son œil aimable - Les flâneurs, les rêveurs, les touristes pressés - Et le flot des autos, bruyant, intarissable. Comme il fut salué par les cœurs nostalgiques, Ce roi, ce béarnais, cet aigle de Navarre, Lui qu’on précipita dans l’eau, chose illogique, Un jour que l’on criait « tous les rois sont barbares ! » Mais aujourd’hui ce prince au noble caractère Trône au milieu du Pont qu’il rêva pour Paris Et si vous écoutez, vous entendrez les pierres Crier encore « hourra ! Ce roi-là m’a construit ! »