L’Histoire est un cheval lancé au grand galop, Funeste et magnifique elle foule les hommes De ses sabots qui ont grondé à Waterloo, À Moscou, à Berlin, à Carthage ou à Rome !
De ses larges naseaux jaillissent les tempêtes ; Son souffle est continu et jamais altéré ; Les larmes de ses yeux abreuves les poètes Et souvent les pythies furent épouvantées Lorsqu’au loin, sourdement, ses grands hennissements, Résonnaient, si fatals, d’elles seules audibles !
Bonaparte, Hannibal et d’autres par la bride, Le tinrent un moment, montèrent sur son dos Et César et Pompée, la dernière Lagide Y trouvèrent leur gloire et aussi leur tombeau ! Rien ne l’arrêtera, ce fougueux destrier, Aucun peuple jamais ne l’apprivoisera ; Nous aurons beau prier, sangloter ou crier, Devant lui bondira, rien ne l’arrêtera ! Des fous tenteront bien de lui barrer passage : Mais que peut le brin d’herbe contre l’incendie, Que peut le moucheron face au terrible orage ? Alors il leur faudra sacrifier leur vie !
Écoutez, hommes, le galop du coursier Retranscrivez ses cris avec humilité Car nous ne sommes rien et nous restons figé Quand il fond et se rue jusqu’à l’éternité !