Des mains tristes posées comme des oiseaux morts Sur des cuisses immobiles soigneusement serrées, Inutiles et ridées, mais si vivantes encore Remplies de souvenirs passés presque oubliés…
Elles en auront vécu des histoires et des peines Menottes de l’enfant dormant dans le berceau Encre noire imprimée auréolant les veines Tâches de confiture, sucre doux des sirops…
Et puis vient cet instant où les doigts se promènent Sur un visage ému, c’est la première fois ! Les paumes se caressent le désir qui les prennent Allume alors le feu quand elles sautent le pas…
Un anneau fait d’amour vient les enjoliver Promesse d’un toujours quand enfin elles se joignent Entremêlées, liées, douces et affolées Elles découvrent la vie quand l’enfance s’éloigne…
Des pleurs vont les laver souvent, et la prière Les lève vers le ciel en geste douloureux S’imprégnant d’une force dont elles se sentent fières La rage les saisit aux abords des adieux…
Peu à peu elles s’apaisent, plénitude de l’âge Offrant de gros bonbons à des têtes penchées Et comme une dentelle précieuse, enfin sages Elles deviennent le nid des êtres tant aimés…
Un jour couchées trop blanches sur une toile lisse Elles dormiront tranquilles heureuses à tout jamais Ces mains que je regarde avant que ne finisse Le temps où l’on s’aimait mêlant nos doigts noués…