Mémoire Grise
Pourquoi seul le temps nous fait-il oublier
Les blessures de l'amour, et les chairs disparues ?
Pourquoi faut-il compter les grains du sablier,
Les périlleux détours, et les pentes ardues ?
Pourquoi un beau matin, alors que l'on craignait
(Comme chaque jour depuis...) un éveil difficile,
Qu'aux pleurs et aux ténèbres, la vie nous consacrait
Nos yeux s'ouvrent enfin, clairvoyants et agiles ?
Des lourds moments d'attente jusqu'à l'instant propice,
Y'aurait-il sur ce fil, un quelconque équilibre ?
Le coeur s'est arrêté, et puis soudain il vibre ?
Dans l'ombre et la lumière, c'est la même injustice.
Peut-être est-ce un conseil, peut-être est-ce un message,
Que la nécessite prodigue à la mémoire ?
Que sont ces heures grises couronnées par l'espoir ?
Un fardeau que folie et raison se partagent.
Quand ces froides alliées, ont fini leur labeur,
Et que nous embrassons, l'idée du désunir,
Nous sentons à nouveau la naïve grandeur,
Du sot qui se souvient, sans pour autant souffrir.
Certains pourtant demeurent, amoureux pavloviens,
Sisyphes résignés, faisant rouler leur roche,
Abattus, enchaînés, tristes comme des chiens,
Attendant patiemment, qu'on raisonne la cloche.
Aucun signe, aucun mot, aucun être n'éclaire,
Ce chemin solitaire qu'il nous faut arpenter,
Qui laisse en nous l'avant et l'après dialoguer,
Nous livre à nos démons, et puis qui les fait taire.