Enigme bleue
Son nom est à lui seul un envoutant mystère,
Une insoluble énigme, dans laquelle on se perd,
Une esquisse, un prélude, une préface digne,
De la grâce infinie du tableau qu’il désigne.
Elle est femme ou déesse, troublante et irréelle,
D’une étrange beauté, froide et atemporelle,
Son visage rêveur, son regard de lumière,
Nous font presque oublier qu’elle est statue de pierre.
Elle semble se détendre après un long chemin,
Comme venue d’un monde inconnu et lointain,
Le menton sur la main, perdue dans ses pensées,
Gardienne d’un secret que nul ne peut percer.
La douceur de ses traits, et son air impassible,
Ne dissimulent en rien sa nature invincible,
Et la force inouïe que l’on devine en elle,
La distingue à jamais d’une simple mortelle.
Le temps s’est épuisé à vouloir la combattre,
Mais elle a triomphé, conservant presque intactes,
Malgré quelques fissures à sa large crinière,
Sa jeunesse éternelle et son allure fière.
Elle porte au poignet, comme un trophée de guerre,
Une chaine brisée aujourd’hui ou naguère,
Rappelant que jamais nul ne pourra dompter,
Ni son âme guerrière, ni sa liberté.
Que la joie nous prodigue ses plus doux rayons,
Que le chagrin nous plonge dans un puits sans fonds,
Tout tombe dans l’oubli dès lors qu’on la découvre,
Et qu’au creux de notre âme une porte s’entrouvre.
Les questions se bousculent, on voudrait la connaitre,
Et se faire aimer d’elle avant de disparaitre,
On reste à l’observer pendant de longues heures,
Prisonniers de son charme éclatant de froideur.
Alors que peu à peu notre gorge se serre,
A l’idée que son cœur soit lui aussi de pierre,
Et que l’on s’interroge à en perdre raison,
Son regard nous transperce et fixe l’horizon.
