Tu sais, je n'écris plus en mauve d'encre. Cette couleur s'est assombrie quand tu es partie. D'abord violette puis prune, cette encre... Cette encre qui est ton de jeunesse a vieilli.
C'est mon cœur aussi sans doute qui a pâli, Un peu comme une toile exposée au soleil, Moi exposée à ton bonheur, j'ai pâli... Palliant le manque par le noir et non le vermeil.
Un peu comme écrire avec son propre sang, Assurément, cette couleur me plaisait bien, Mais exsangue étais-je, bon sang ! Il ne restait plus une goutte, plus rien…
Alors, du noir j’ai désiré passer à l’invisible, Comme pour chuchoter aux pages du carnet Un secret bien gardé. Amie de l’invisible ! Disparaître, me fondre dans la fibre ou le signet.
En prenant soin de t'éviter, craignant la lumière, J'ai loué les anges, les dieux, les mortes feuilles, Et j'ai écrit cent poèmes en ombres et lumière ! Tout cela en noir – ton fard ! – en guise de deuil.
Mais un soir, mon âme trembla dans la nuit. J'ai par mégarde pensé à toi. Une bougie coulait... Elle était noire comme ce fard, comme la nuit. Je me suis simplement dit : "Cela lui plairait.".
Alors le mauve m'a serré entre ses rubans, Le crépuscule et la valse chantaient sur la falaise. Le crâne pris dans le tendre étau des rubans, Je voyais le sable, l’anneau, notre genèse…
Puis le vide avalant la mélancolie – ou le spleen – Ne restait de ces images qu'un bris de miroir. Ce fut, je le sus, un désir de violet dans le spleen, – Violine ! – Un brin de lilas dans l’encrier noir.