Il fait, au vert des prés, pousser les primevères Dès les premiers beaux jours, et les petits enfants Comme ils sont à sa taille, arrivent en courant Pour lui donner leurs mains, chaque fois ils espèrent Un regard échangé avec le mouton blanc.
Les écheveaux de laine, au flanc de la colline Paissent tranquillement, et le peintre appliqué Peut poser des points clairs entourant un rocher Perles de poésie à son image alpine Que le vent frais d'été vient avec soin sécher.
Quand il est doté de cinq pattes, il faut dire Qu'il fait beaucoup parler, et les plaisanteries, Sur lui sont entendues, et disent à l'envi L'intérêt de la norme au mépris du délire, Et la raison du nombre au-dessus de la vie.
Nul ne sait que penser de ces hordes bêlantes Qui se taisent dès que le vent les pousse au train, Tant elles sont flattées par le souffle divin Et tombent en silence entre les mains béantes Du premier prophète passant sur leur chemin.
Que faut-il en dire ? Pour moi, c'est entendu, Le mouton, dans la vie, n'a pas meilleur ami Que le loup, déguisé, prolixe en flatteries, Par qui il finira rôti rose et dodu* A la table du roi, façonné et bien cuit.