Dès que le jour paraît, le fils du vent se lève, Il pousse le rocher, solitaire, et sans trêve. Le voici titubant, ce brigand de Corinthe Qui, sans un mot, expie, pour que tout s'accomplisse Et son front abattu s'assombrit et se plisse, Car personne ici-bas n'écouterait sa plainte.
Et, comme le soleil qui monte en haut des nues, Lentement, le rocher, de la cime inconnue S'approche. On dirait que Sisyphe et le soleil Font le même trajet, comme la vérité Pour éclairer le monde, et comme elle, retombée Dans l'oubli de la nuit sous la lune vermeille.
Tout au long de sa vie, l'homme prend ce chemin, Il monte avec peine jusqu'à son midi plein. Sans regarder derrière, il dévore la vie, Jusqu'en haut de son âge, puis il doit redescendre En retenant ses pas qui glissent sur la cendre, Mais le rocher l'entraîne et l'histoire finit.
Sisyphe, au lourd fardeau, je pense à toi souvent, Toi qui fus condamné jusqu'à la fin des temps Pour avoir renié la puissance des dieux. Lourde à mes épaules, cette pierre de vie Monte inlassablement jusqu'au soir infini, Cherchant la vérité sous la voûte des cieux.