Nous regrettons tous Nos chers disparus trop tôt. Après leur départ, nous avons tantôt Envie d’appeler à la rescousse, Tantôt, poussés par la révolte, Et incapables d’assumer la récolte De tous les préceptes inculqués, Nous n’acceptons ni le drame, Ni ne comprenons l’abominable trame. Les événements restent inexpliqués, Et tout se mélange ; Et la vie devient étrange. Les nuits ne sont plus les mêmes Pour le mari qui a perdu sa femme. Restée seule, la veuve se trouve désarmée Face aux questions désemparées de ses enfants. Elle sera aux aguets et au moindre bruit, alarmée, Tant que ses petits auront besoin de leur maman. Pour le bambin qui a perdu son papa, Il n’y a plus nulle part, cette main Amie pour guider chacun de ses pas A travers toutes les embûches du chemin. Quant aux parents qui sont frappés Par la perte d’un fils ou d’une fille, Ils n’acceptent jamais que leur enfant ait été happé Par la faucheuse qui n’est jamais gentille. Quand aux vieux, grand-parents attendris, Qui espéraient tant voir grandir les benjamins, Ils se trouvent amputés d’un organe ou d’une main, Et se traînent dans leur chagrin, endoloris. On les voit plongés dans un désarroi total, Haïssant, blasphémant et refusant l’issue fatale, De l’accident ou de la maladie qui leur a ravi L’objet ô combien précieux de leur seconde vie. L’image de l’innocente petite victime, Qui d’ores et déjà dort au fond de l’abîme Leur reproche d’être encore de ce monde. Alors ils s’accusent presque à chaque seconde D’être des parents indignes et incapables. Leur impuissance les mortifie et les accable. Alors, ils restent prostrés des journées entières, Allant jusqu’à oublier de s’occuper d’eux mêmes. Ils repensent sans cesse à ceux mis en terre, Et qui ne leur diront plus jamais je t’aime.