Chère et inoubliable Hédia ! . . . Te rappelles-tu les soirs de clarté Quand tu es assise seule dans ta véranda . . . Te rappelles-tu, bercée par une brise d’été Douce, légère et parfumée au jasmin . . . Te rappelles-tu de ces deux gamins Victimes de leur impétuosité. . . De ces deux véritables empotés Aux gestes et aux sourires embêtés. Te rappelles-tu de leurs yeux Dévorés par la curiosité. Comme ils étaient anxieux . . . Comme ils étaient désarmants Dans leurs tentatives désordonnées. Du coup, ils ne furent jamais amants. Moi, au soir de mes dernières années, Je suis douloureusement ému et apeuré Car leur doux souvenir me fait pleurer. Non, je n’ai pas honte de mes larmes Car ce sont mes seules armes Pour t’avouer ma résipiscence à dessein : Je jure que je n’ai jamais pu oublier Ni ton petit minois ni tes petits seins Qui pointaient sous ton joli tablier. Je me rappelle t’avoir sur la joue embrassée Mais, craignant ta légitime réaction A cause de ma vilaine action, Je n’avais jamais osé te caresser Là où ont poussé deux superbes collines Héritières de toutes sortes d’arbres fruitiers Que je devine en bonne santé et altiers Lorsque des épaules et du buste tu dodelines. Alors je hais celui qui a le bonheur inouï De regarder ; de caresser et de mordre à l’envie
Dans ces grenades ; dans ces pommes ; Dans ces pêches ; dans ces poires Qui me condamnent au désespoir Parce que me voilà déjà un vieil homme.