Pour essayer de vous émouvoir, Je vais vous conter une histoire Découverte dans un vieux grimoire. C’est celle de cet amour dérisoire Jonché dés le début de déboires, Et dont les protagonistes sont contradictoires. Lui, coureur et séducteur notoire Est expert en échappatoires. Quand il baratine, il ne laisse jamais rien voir. Quand il promet, il ne craint jamais de décevoir. Elle, amoureuse et ne semblant rien percevoir, Pense que le bonheur est obligatoire. Naïve, pour ne pas dire véritable poire, Elle s’est facilement faite avoir. Depuis, elle se pose en victime expiatoire. Elle garde sa souffrance dans sa mémoire. Pourtant, elle s’est fixé pour unique gloire, De ne jamais céder au désespoir. Elle est sûre que son amant provisoire Fera de son retour un devoir. Alors, quand tombe le soir, Elle rend visite à son armoire Et passe sa robe en moire Pour être prête à le recevoir. Comme dans un rituel ambulatoire Elle quitte à heure fixe son boudoir Pour arpenter à nouveau les couloirs De son adorable manoir, Tenant dans une main son bougeoir, Avec dans l’autre main, son encensoir. La bougie, c’est par peur du noir. L’encens, c’est pour continuer à croire Que sa patience peut être décisoire ; Que ne pas séjourner dans le purgatoire Serait des plus blasphématoires, Quand on se prétend méritoire. Elle se persuade de façon ostentatoire Que son attente n’est pas illusoire. En fait, elle se fait du mal sans le savoir Car elle n’est pas prête d’apercevoir La plus petite lumière d’espoir : Celui qu’elle aime est en train de boire En expliquant à ses copains de comptoir, Comment faire l’amour dans une baignoire, Avant d’ajouter que s’attacher est accessoire.